Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
30 mai 2020 6 30 /05 /mai /2020 12:00

Éditions Gallimard, 2011

 

 

Ce livre traînait dans ma bibliothèque depuis longtemps, mais la crise due au Covid-19 que nous traversons actuellement m’a enfin donné une bonne raison de l’ouvrir. En effet, la question de notre comportement individuel et collectif face à une catastrophe d’une telle ampleur est aujourd’hui interrogée et scrutée chaque jour, que ce soit via les médias ou bien plus simplement au sein de la sphère privée.

Dans Du bon usage des catastrophes, l’écrivain et philosophe français Régis Debray questionne avec une ironie mordante le positionnement de nos sociétés contemporaines face au risque. Comment appréhendons-nous la catastrophe ? Que représente-t-elle pour nous ? À ces questions l’auteur dégage trois axes de réflexion. La catastrophe peut tout d’abord avoir valeur d’avertissement. Elle peut également avoir valeur de pédagogie. Enfin, elle peut s’entendre comme une « alerte à l’alerte, mise en garde contre le catastrophisme ». Trois entrées en matière possibles, qui conduisent l’auteur à diriger ses pas vers la figure du prophète, souvent considéré comme oiseau de mauvais augure, mais dont la fonction annonciatrice a traversé les siècles et les civilisations. Car l’homme ne s’est jamais départi de cette pulsion viscérale le conduisant à symboliser chaque signe. C’est cette frénésie du symbole, de la vision, de l’interprétation qui a ouvert la voie à tous les prophétismes possibles et inimaginables. Du philosophe de comptoir à l’éditorialiste médiatique, du tribun religieux au redresseur de torts politique, du complotiste à l’exégète eschatologique, nos sociétés contemporaines se trouvent saturées de ce verbe imprécateur, qui s’impose à nous bien plus pour le pire que pour le meilleur. Ces diatribes aux différents registres mêlent principalement comme modes opératoires la surprise de la nouveauté, des concepts vagues et abstraits, le martèlement de la répétition, ainsi qu’une prétention à l’hétérodoxie. Avec pour conséquence ultime la plus grande catastrophe d’entre toutes : l’anémie de la pensée.

 

 

Par Matthieu Roger

Partager cet article

Repost0
17 mars 2019 7 17 /03 /mars /2019 17:02

Éditions La Découverte, 2016 (5e édition)

 

 

 

 

Dans ce désormais classique de la sociologie, les Pinçon-Charlot décryptent la manière dont les bourgeois perpétuent leur oligarchie et leur domination sur la société française. Se plaçant dans la continuité de Marx et de Bourdieu, ils analysent le comportement la classe bourgeoise à l'aune de son capital économique, de son capital social, de son capital culturel et de son capital symbolique. Car c'est bien l'alliance de ces quatre capitaux qui assure à la bourgeoisie sa capacité de reproduction sociale tout en haut de l'échelle sociale et économique. Leur enquête, qu'ils mènent en continu depuis plusieurs dizaines d'années, s'avère extrêmement précise et fouillée, détaillant les réseaux et lieux d'éducation, de mondanité, de cooptation et de pouvoir propres à cette caste. Une bourgeoisie internationale, sûre de ses forces, tant ses avantages comparatifs sont grands par rapport aux autres classes de la population. Ce tableau sociologique fait froid dans le dos, puisque la bourgeoisie ne poursuit que la défense de ses propres intérêts. Avec ce constat implacable : l'intérêt général n'est donc jamais de son ressort. Dont acte.

 

Je conseille de lire Sociologie de la bourgeoisie en concomitance avec La caste d'Éric Mauduit, ouvrage déjà chroniqué sur ce site, et Le Code Jupiter de Démosthène. S'offrira alors à vous le panorama extrêmement inquiétant mais bien réel du fonctionnement népotique de l'oligarchie française.

 

 

Par Matthieu Roger

 

Partager cet article

Repost0
21 février 2019 4 21 /02 /février /2019 12:35

Éditions Gallimard, 2011

 

 

Ce petit ouvrage d'une quarantaine de pages nous livre le discours prononcé en 2010 par l'auteur péruvien Mario Vargas Llosa lorsqu'il reçut le prix Nobel de littérature. Il y proclame de manière touchante et extrêmement persuasive la nécessité de lire et d'écrire, cette importance fondamentale du rapport intemporel de l'homme à l'écriture, qui l'inscrit immanquablement dans la cité. À l'instar de ce que décrivait Roland Barthes dans Le plaisir du texte, pour Mario Vargas Llosa écrire s'avère être "une manière de vivre dans l'illusion et la joie, avec un feu crépitant dans la tête, en luttant contre les mots indociles jusqu'à les maîtriser, en explorant le vaste monde comme un chasseur derrière des proies convoitées pour alimenter la fiction en herbe et apaiser cet appétit vorace de toute histoire qui, en grossissant, voudrait avaler toutes les histoires" (page 41). Plus encore, écrire c'est selon lui "créer une vie parallèle où nous réfugier contre l'adversité, et qui rend naturel l'extraordinaire, extraordinaire le naturel, dissipe le chaos, embellit la laideur, éternise l'instant et fait de la mort un spectacle passager" (page 11). Ces quelques phrases en disent long sur le feu intérieur qui consume l'auteur, un feu né dès son plus jeune âge au contact des oeuvres de Jules Verne, Alexandre Dumas, Victor Hugo, Flaubert ou encore Charles Dickens.

 

Éloge de la lecture et de la fiction est l'un des plus vribrants hommages rendus à la littérature, une invite éloquente à s'engouffrer dans l'espace-temps créatif des écrivains.

 

 

 

Par Matthieu Roger

Partager cet article

Repost0
27 décembre 2018 4 27 /12 /décembre /2018 19:35

Éditions Glénat, 2017

 

S'il vous manque encore un dernier cadeau pour ces fêtes de fin d'année, n'hésitez pas ! Le Syndrome de Stendhal, bande dessinée se rapprochant du roman graphique par sa narration, fera fort bien l'affaire. Ce bel ouvrage d'une centaine de pages, que l'on doit à Aurélie Herrou au scénario ainsi qu'au dessinateur Sagar, nous entraîne aux côtés de Frédéric Delachaise, noble désargenté se retrouvant surveillant de salle au Centre Pompidou. Son amour instinctif de l'art, notamment de la danse, de la peinture et de la musique, lui jouera bien des tours, puisqu'il se voit peu à peu frappé du syndrome de Stendhal ! Le lecteur, emporté par le coup de crayon vif aux teintes claires de Sagar, navigue alors dans les méandres colorés et fantasmagoriques de notre protagoniste. Lequel n'est pas en reste de problèmes à résoudre, sa future femme semblant plus préoccupé par le standing très people de leur mariage à venir que par ses états d'âme...

 

Truffée de références artistiques - quasiment une par page - allant de Christo à Francis Bacon en passant par George Gerswhin ou encore Takasi Murakami, cette bande dessinée ravit par son élégante légèreté et la réflexion qu'elle soulève sur la culture savante et muséale de l'art contemporain. On soulignera également le travail assez remarquable des assistants coloristes Alba Cardona et Carlos Moreno, dont les jeux de couleurs extrêmement variés viennent parfaitement souligner les mises en scènes visuelles conçues par Sagar. Quant au récit concocté par Aurélie Herrou, il s'avère parfaitement rythmé et son humour de tous les instants fait mouche, avec une mention spéciale au personnage désopilant de Monsieur Lefian, ancien militaire bourru reconverti en superviseur du personnel.

 

 

Par Matthieu Roger

Partager cet article

Repost0
29 janvier 2018 1 29 /01 /janvier /2018 14:35

Les Moutons électriques, 2015

 

 

 

Si cela n'est déjà fait, il vous sera difficile de vous procurer cet ouvrage, car son tirage effectué à seulement deux mille exemplaires est désormais épuisé. Pas étonnant du tout si l'on considère la qualité de cette édition limitée entreprise par Les Moutons électriques en association avec Elbakin, dont l'exposition encyclopédique des grands auteurs du merveilleux cohabite au côté d'une iconographie riche, superbe et originale. De nombreux spécialistes du genre, parmi lesquels on retrouve avec grand plaisir Ugo Bellagamba et Jean-Philippe Jaworski, ont accepté tour à tour de donner leur éclairage sur les grands écrivains - parfois illustrateurs - de fantasy. Après que l'introduction ait défini ce registre littéraire de plus en plus en vogue, défile sous nos yeux l'oeuvre de ces grands conteurs à l'imaginaire si fertile : Les Mille et Une Nuits, Perrault, Anderson, Lewis Caroll, J.R.R. Tolkien, Robin Hobb, G.R.R. Martin, etc. J'ai été ravi de retrouver leurs grands mythes qui ont bercé si longtemps mes lectures de l'imaginaire, mais le plus intéressant, avec ce grand panorama illustré, c'est sans doute de découvrir ces auteurs qui nous sont inconnus, et dont les notices biographiques suscite chez nous une curiosité inextinguible et soudaine, cette envie immédiate d'appréhender un nouvel univers, de feuilleter les pages à la rencontre de nouveaux héros. Arthur Rackham, Mervyn Peake, Micharl Moorcock, Neil Gaiman, autant de noms jusqu'alors inconnus, autant d'invites pour de nouveaux voyages. On regrettera seulement que quelques grandes figures incontournables comme Glen Cook aient été oubliés, mais nul panorama ne peut in fine prétendre à l'exhaustivité.

 

Ce panorama illustré de la fantasy et du merveilleux constitue un must have que tout amoureux des écritures de fiction se devrait de posséder. Un beau livre dans lequel on se replonge avec gourmandise, "au coeur du légendaire, du féérique, de l'épique et du merveilleux". Captivant !

 

 

Par Matthieu Roger

Partager cet article

Repost0
27 juillet 2016 3 27 /07 /juillet /2016 14:05

Tana Éditions, 2016

 

 

Genís Carreras entreprend ici une démarche extrêmement orginale : mêler au sein d’un même ouvrage design et philosophie. Pensé comme un dictionnaire visuel, Philographique confronte une centaine de paradigmes et concepts philosophiques en « isme » à leur délinaison en logos géométriques. Chaque double page permet au lecteur de redécouvrir une notion philosophique fondamentale – absolutisme, déterminisme, monisme, positivisme, stoïcisme, etc. – et de la mettre en perspective grâce à des dessins à la fois épurés et vecteurs de sens. Ces métaphores visuelles, outre leur originalité graphique, viennent compléter la définition fournie. Symboles ou représentations abstraites, leur agencement et leur couleur questionnent tout autant qu’elles précisent. Voici ci-dessous, à titre d’exemples, trois vis-à-vis proposés par l’auteur.

 

« Anarchisme : série de conceptions qui s’opposent à l’idée d’État comme moyen de gouverner et qui défendent une société basée sur des relations non hiérarchiques. » (p.16-17)

 

« Historicisme : théorie qui suppose que pour comprendre un événement historique, vous devez comprendre le contexte philosophique dans lequel il prend place, au lieu de l’expliquer avec des idées supposées intemporelles ou fondamentales. » (p.92-93)

 

« Socialisme : système économique dans lequel les moyens de production sont possédées et contrôlées par le plus grand nombre et pas par quelques-uns. » (p.168-169)

 

Un symbole placé près du numéro de la page indique à quel domaine de la philosophie la théorie concernée appartient : métaphysique, morale, épistémologie, politique, religion ou divers. L’anarchisme, l’historicisme et le socialisme sont ainsi logiquement classés dans le domaine politique, là où le cynisme sera plutôt du ressort de la morale et le pessimisme du ressort de la métaphysique.

J’ai trouvé ce livre passionnant car il ouvre mille portes de réflexions sans pour autant s’engager dans des détours intellectuels absconds. L’alliage de la théorie et de supports visuels est très bien pensé et constitue une manière inédite de réfléchir la pluralité des points de vue humains. Philographique ou comment aborder la culturelle générale de manière inventive et créative. Bravo à Genís Carreras !

 

 

 

 

Par Matthieu Roger

Partager cet article

Repost0
26 janvier 2016 2 26 /01 /janvier /2016 11:37

Éditions Julliard, 2015

 

 

 

La réputation de Denis Robert n'est plus à faire. Journaliste d'investigation, il s'est notamment démarqué lors de la très médiatique affaire Clearstream par son obstination et son étude consciencieuse des faits. Dans Mohicans, sa dernière enquête, il nous livre sa version de l'histoire du journal le plus polémique de France. Un portrait à charge contre Philippe Val, Richard Malka, Cabu, et dans une moindre mesure ceux qui ont repris la marque Charlie Hebdo depuis 1992. Son ouvrage vient contrebalancer les prétendues vérités défendues par Philippe Val dans son livre C’était Charlie. Denis Robert retrace le parcours chaotique d'un journal à travers Hara-Kiri Mensuel, Hara-Kiri Hebdo, la Gueule Ouverte, Charlie Mensuel et Charlie Hebdo, et ce jusqu’en mai 2015, après les tragiques événements du 7 janvier.

Selon lui, il y a deux périodes. La première, de la création à la disparition d'Hara-Kiri en 1982, est la plus faste. Celle où l'humour, l'insolence, la subversion ont amusé, choqué ou ouvert les yeux de toute une génération de lecteurs et libéré la voie à une nouvelle façon de faire du journalisme. La seconde, de 1992 à nos jours, qui verra la dilapidation de l'héritage et le remodelage de l'hebdomadaire. L'humour bête et méchant est remplacé par des prises de position politiques, le titre est volé à Cavanna qui est progressivement mis au rebut, les contradicteurs sont évincés, etc. Le tout dans un but d'enrichissement personnel et d'assouvissement d'une soif de pouvoir.

 

Comme à son habitude, l'auteur s’appuie sur des sources précises, des recherches minutieuses et de nombreux entretiens pour expliquer le travail de sape d'un concept par le fossoyeur Val. Néanmoins, il rend également au fil des pages un bel hommage à ceux qu'il appelle les Mohicans : Choron, Delfeil de Ton, Reiser, Gébé, Siné, Fournier, etc., mais surtout Cavanna, le boss, plume impétueuse autant que talentueuse. Des kamikazes qui ne prenaient rien au sérieux et pour qui tout était prétexte au rire ! Il conte leur histoire, aussi belle qu'éphémère. Une aventure unique qui sent le sexe, l'alcool et la liberté !

 

 

Par KanKr

Partager cet article

Repost0
30 novembre 2015 1 30 /11 /novembre /2015 15:04

Les Presses Universitaires de France, 2012

 

 

En ces temps sombres où la bêtise s'impose comme une philosophie de vie, voilà un opuscule profondément moderne ! À travers Les lois fondamentales de la stupidité humaine, Carlo Cipolla nous décrit le fonctionnement de la société en dégageant quatre grandes catégories dans lesquelles il classe les individus : les crétins, les intelligents, les bandits et les stupides. Ils se démarquent les uns des autres par l'effet de leurs actions individuelles sur l'ensemble de la société. Ainsi, celles d'un crétin entraînent des pertes pour lui et des gains pour autrui, l'être intelligent agit de manière à procurer un bénéfice à tous, le bandit n'envisage que son seul avantage, quant à l'être stupide ses actions engendrent des pertes pour les autres sans aucun profit pour lui-même. Partant de ce principe, chaque être humain se situe irrémédiablement dans un de ces cercles. Il tire ensuite cinq lois fondamentales et leur impact sociétal pour conclure son propos par ce simple constat : tous nos déboires ont la même origine, la stupidité humaine ! Ce truculent brûlot, égratignant sans compter le fléau que représente la bêtise pour l'humanité, met en évidence que les êtres stupides sont légion, mais aussi que ce caractère ne s'apprend pas, celui-ci est inné. En ce sens, il est impossible de les manipuler puisque leur comportement s'exprime hors de toute pensée rationnelle.

 

Traité d'un ton absurde et plein d'humour, ce petit chef-d’œuvre sans prétention de l'historien économique italien vaut le coup de perdre quelques instants à le lire. Avec ses 72 pages étayées de graphiques à la portée de tous, il est rapidement dévoré et son sujet inattendu ouvre une réflexion mélangeant philosophie, économie et sociologie tout en restant un traité à la portée ludique. L'auteur nous offre, sous un aspect d'étude scientifique, un essai sans chiffres ni sources, qui a comme vertu de prouver qu'il est possible d'extraire des lois sur tout et n'importe quoi ! Formidablement bien pensé, si en finissant l'ouvrage on en conclut que les individus stupides sont supérieurs en nombre, celui-ci a surtout le mérite de mettre en garde contre les théories ineptes foisonnantes !

 

 

Par KanKr

Partager cet article

Repost0
15 octobre 2015 4 15 /10 /octobre /2015 10:11

Les Échappés, 2015

 

 

 

Il existe des ouvrages qui pèsent plus que d'autres, et cela indépendamment de leur taille ou du nombre de pages qui les composent. L'ultime opus de Charb, Lettre aux escrocs de l'islamophobie qui font le jeu des racistes, est de ceux-là. Lourd de souvenirs, lourd de conséquences, lourd de sens surtout, il y effectue une mise au point concernant les attaques constantes qui touchent le journal dans lequel il officie. Un coup de colère venant du cœur, qui a gagné en force avec l'assassinat de son auteur le 7 janvier dernier, deux jours seulement après l'avoir bouclé. Si sa plume s'est tue à tout jamais, il nous laisse une ode à la liberté d'expression, fustigeant l'ignorance et l’imbécillité, intelligemment écrite.

 

En sept lettres il répond à tous ceux qui les accusent, lui et Charlie Hebdo, d'être islamophobes. Dans sa ligne de mire, tour à tour les extrémistes religieux se servant du dogme pour asseoir leur légitimité, les racistes qui détournent l'hebdomadaire pour véhiculer leurs idées, les médias qui agitent des chiffons rouges dans leurs colonnes et les politiques fébriles qui cèdent face à la pression des extrêmes, au point d'aller à l'encontre de la législation française. S'il poursuit ici son combat, c'est sans agression, mais en invoquant les racines des mots dans une leçon de vocabulaire adressée à tous ceux qui en dévoient le sens. Sans cesse pointé du doigt et jugé pour provocation envers les musulmans, il rappelle que les phobies sont des peurs et que, par extension, l'islamophobie est une peur de l'islam. Or, si la peur est regrettable, elle n'est en rien condamnable. En fervent défenseur de l'égalité des droits, il constate que le terme islamophobie a remplacé celui de racisme et dénonce dans ce livre l'instrumentalisation de cette formule pour amalgamer les antiracistes critiquant un culte à ceux qui s'en prennent aux adeptes de l'islam. Critiquer une spiritualité est devenu aussi répréhensible que de discriminer quelqu'un en raison de son appartenance religieuse.

Charb nous laisse son dernier témoignage quant à son inquiétude de voir la lutte antiraciste évincée par une lutte pour la protection et la promotion d'une théologie, mais aussi de voir la libéralisation du racisme ouverte par le débat sur l'identité nationale engagé par Nicolas Sarkozy. Il milite pour son droit à l'humour, son droit au blasphème, considérant qu'il n'y a pas de doctrine au-dessus des autres. La pointe critique est toujours là, le cynisme aussi, mais uniquement pour souligner le ridicule de ces messages mortifères. Ainsi conclut-il cet opuscule posthume en posant la question suivante : et l'athéophobie dans tout ça ?

Si incontestablement Charb était un dessinateur de talent, sa plume n'a rien à envier à son coup de crayon ! Un hymne à l'antiracisme à lire sans modération !

 

 

 

Par KanKr

Partager cet article

Repost0
25 juillet 2015 6 25 /07 /juillet /2015 12:20

Allary Éditions, 2015

 

 

Cette bande dessinée, ou devrais-je plutôt dire ce roman graphique, est un récit autobiographique narrant la jeunesse de l’auteur. Ce deuxième tome explore les années 1984 et 1985, lorsque le petit Riad Sattouf revient avec ses parents s’installer en Syrie près de Homs, là d’où est originaire son père.

 

Plus qu’un besoin de revenir sur les étapes marquantes de son enfance, ce qu’il fait d’ailleurs avec beaucoup d’humour, L’Arabe du futur 2 permet à Riad Sattouf de peindre avec force détails la société syrienne des années 1980. Ce sont les questions sociétales qui l’intéressent le plus et, à travers ses yeux d’enfant, on découvre peu à peu la place difficile de la femme dans cette Syrie profondément patriarcale, l’endoctrinement mis en place à l’école auprès de la jeunesse en faveur du régime dictatorial de Bachar El-Assad, la concurrence du consumérisme occidental vis-à-vis des modes de vie traditionnels, la place centrale de l’Islam dans les relations sociales, le clientélisme des apparatchiks syriens, etc. Et qui de mieux que Riad Sattouf, né d’une mère française et d’un père syrien, pour nous retranscrire avec l’innocence – toute relative – de l’enfance la complexité de cette société ? Usant d’une gamme chromatique très restreinte, à savoir le rose, le noir, le rouge et le vert, ces trois dernières couleurs rappelant le drapeau syrien, chaque anecdote de vie est pour lui le moyen de confronter les points de vue (celui de son père, de sa mère, de ses cousins, de sa famille, de ses voisins, de ses camarades de classe, etc.) sur l’évolution des moeurs. Souvent avec drôlerie mais sans pour autant évacuer le plus tragique, lorsque par exemple une femme est assassinée par ses deux frères car coupable de relation hors mariage. Bien que dénoncés à la police, les deux meurtriers seront rapidement relâchés et bénéficieront du soutien d’une partie du village, qui rejette l’opprobre sur leur soeur lâchement assassinée.

 

À l’heure où la guerre civile fait rage en Syrie, la lecture de L’Arabe du futur 2 pose quelques jalons bienvenus quant à la compréhension de l’histoire socio-économique de ce pays.

 

 

 

Par Matthieu Roger

Partager cet article

Repost0

Recherche

Rhapsodie

Mon âme et mon royaume ont pour vaisseaux les astres

Les cieux étincelants d’inexplorées contrées

Ébloui par l’aurore et ses nobles pilastres

J’embrasse le fronton du Parthénon doré

 

 

Frôlant l’insigne faîte des chênes séculaires

Je dévide mes pas le long d’un blanc chemin

À mes côtés chevauche le prince solitaire

Dont la couronne étreint les rêves de demain

 

 

Au fil de l’encre noire, ce tourbillon des mers

Ma prose peint, acerbe, les pennons désolés

D’ombrageux paladins aux fronts fiers et amers

Contemplant l’acrotère d’austères mausolées

 

 

Quiconque boit au calice des prouesses épiques

Sent résonner en lui l’antique mélopée

Du chant gracieux des muses et des gestes mythiques

Qui érigent en héros l’acier des épopées

 

 

Par Matthieu Rogercasque-hoplite