Actes Sud, 2015
Les Adieux à l'Empire est une grande fresque romanesque qui nous replonge au cœur de l'épopée impériale du début du XIXe siècle. Le narrateur et protagoniste, Des Ronans, est un hussard ; homme de guerre, certes, mais également fin lettré, adepte de la philosophie et des maximes stratégiques de Sun Tzu. « Lorsque Sun Tzu écrivit les versets de L’Art de la guerre, il y a des milliers d’année, l’armée était bien différente de celle d’aujourd’hui mais l’Empereur se préoccupe toujours de concentrer la masse de rupture sur un point donné et de frapper au moment le plus opportun qu’il crée par l’utilisation des autres masses… » (p. 75) C'est son destin extraordinaire que déroule Olivier Barde-Cabuçon au fil de ce récit aussi passionnant qu'haletant. Un destin qui emmène le lecteur aux quatre coins de l'Europe, des guérillas d'Espagne aux mornes plaines enneigées de Russie, en passant par Vienne assiégée ou bien encore les charniers d’Eylau. « On ne peut pas appréhender la stratégie de l’Empereur si on ne comprend pas que celui-ci débute toujours ses campagnes par un coup vite joué et d’une importance décisive. Ensuite, Napoléon se sert de l’avantage obtenu pour frapper un nouveau coup puis un autre, plaçant chaque fois son gain sur un seul numéro jusque la banque affolée saute. » (p. 394) En filigrane des campagnes napoléoniennes, on marche à la rencontre des états d'âme de Des Ronans, personnage attachant qui n'a de cesse de remettre en cause le sens de sa vie, de ses actions, de ses convictions, de ses amitiés, de ses amours. Avec en second plan la présence de ceux qui détermineront le chemin de sa destinée : Beau Geste, Daphné, La Lune, Della Roca, Spalazini. Autant d'amis, plus ou moins mystérieux, qui l'obligeront à questionner son éternelle fuite en avant vers la mort.
Olivier Barde-Cabuçon signe là une fiction accomplie, qui nous transporte au milieu de la gloire tragique d'une époque fameuse. Il allie avec talent le souffle romanesque à l’épopée militaire, pour peindre au cours ces Adieux à l'Empire des trajectoires de vie hautes en couleurs, que l'on n'oublie pas de sitôt une fois la dernière page de l'ouvrage refermé. Grandiose et émouvant.
Par Matthieu Roger