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23 février 2013 6 23 /02 /février /2013 17:58

Bimensuel édité par Mondadori France

 

guerres & histoire 11

 

 

Avec Jean Lopez, Yacha MacLasha et Benoit Bihan, la rédaction de Guerres & Histoire possède en son sein les plumes qu’il fallait pour mener à bien le passionnant dossier central sur la bataille de Stalingrad proposé ce mois-ci aux lecteurs (p. 32 à 57). Annonçant en une du magazine « Stalingrad, nouvelle vision d’une bataille mythique », ceux-ci nous expliquent comment les affrontements meurtriers de Stalingrad de novembre-décembre 1942, intitulés opération Uranus par les Soviétiques, furent en fait doublés sur le plan opératique d’une opération tout aussi gigantesque bien plus haut nord, à deux cents kilomètres de Moscou, autour du saillant de Rjev. Cette dernière, à savoir l’opération Mars, constitua un échec cinglant pour Joukov et ses troupes, incapables de venir à bout des divisions blindées manœuvrées par Model. Si la mémoire collective a retenu le désastre allemand emblématique de Stalingrad, souvent considéré comme le tournant militaire de la Seconde guerre mondiale, il ne faut pourtant pas oublier les trois semaines de carnage de la bataille de Rjev, qui firent selon David Glantz une centaine de milliers de morts ! D’autant plus qu’on ne peut comprendre la pensée stratégique russe de l’époque, influencée par les penseurs incontournables de l’avant-guerre que sont Alexandre Svetchine, Mikhaïl Toukhatchevski, Gueorgui Isserson et Vladimir Triandalov, sans comprendre son articulation autour de la notion d’art militaire opératif, visant à enchaîner ou combiner simultanément des opérations d’envergure sur des théâtres d’opération géographiquement disjoints. Alors que le commandement militaire allemand réfléchit encore en termes d’accumulation successive de batailles décisives, les Russes appréhendent déjà la stratégie militaire de manière plus globale.

 

Soulignons également dans ce numéro le témoignage impressionnant du médecin-lieutenant Jacques Gindrey (p. 8-14), qui opéra de manière souvent dantesque durant toute la bataille de Dien Bien Phu, à l’issue de laquelle il fut fait prisonnier. De son interview transparaît toute la trempe et le courage de ces hommes qui réussirent à sauver d’innombrables vies sans chercher à épargner la leur. Je vous recommande également l’étonnant article Charles Turquin au sujet de la bataille oubliée entre Allemands et Anglo-Belges sur Grands Lacs africains durant la Première guerre mondiale (p. 90-94). Où l’on apprend que l’Afrique orientale était alors le théâtre de combats navals pour le moins incongrus…

 

Pour conclure, je voudrais m’élever une nouvelle fois contre la manie fatiguante qu’a Guerres & Histoire de surcharger sa mise en page ; à empiler les encarts, textes et visuels, on ne parvient qu’à gêner l’œil et le parcours du lecteur. La rédaction pourrait par exemple s’inspirer de la pagination claire et bien plus lisible du dernier hors-série de Sciences Humaines consacré à la guerre. Mais voilà bien le seul reproche que je puisse adresser à ce magazine, par ailleurs en tout autre point remarquable.

 

 

 

Par Matthieu ROGER

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11 février 2013 1 11 /02 /février /2013 13:33

Coédition Arte Éditions & Armand Colin, 2012

 

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Dans ce livre, Bruno Birolli, grand reporter et correspondant en Asie au Nouvel Observateur, dresse une biographie édifiante du général Ishiwara, figure japonaise incontournable de l’entre-deux guerres. Il réussit à restituer de manière claire la complexité de ce « personnage de roman », dont l’idéologie confuse convoquait à la fois un ultra-nationalisme impérialiste, un militarisme fervent, une réelle sympathie pour le national-socialisme, un nichirénisme prosélyte et une prégnance du kukotai, sorte de code de l’honneur mystico-nationaliste dont il se prévalut tout sa vie. Un cocktail intellectuel détonnant, qui le conduisit notamment à organiser le 18 septembre 1931 l’attentat de Moukden évoqué par Hergé dans Tintin et le lotus bleu. Cet attentat, mené par un cercle restreint de jeunes officiers  bellicistes, mit le feu à la Mandchourie et eut pour conséquence immédiate l’internationalisation du conflit sino-japonais, via l’intervention de la Société Des Nations. On peut même y voir, à l’instar de l’auteur, un des prémices de la Seconde Guerre mondiale.

 

De fait, Ishiwara, l’homme qui déclencha la guerre n’est pas une simple relation de la vie mouvementée de Kanji Ishiwara. Bruno Birolli n’a en effet de cesse d’analyser les actes d’Ishiwara à l’aune du contexte politique japonais. En parallèle au melting-pot doctrinal de notre protagoniste, on découvre un archipel nippon déchiré par les luttes entre les multiples castes politiques au pouvoir : clans militaires à l’influence grandissante, derniers tenants de la démocratie, cabinet privé de l’Empereur Hirohito, utopistes ultra-nationalistes tel qu’Ishiwara. Avec en toile de fond le débat sur la profondeur stratégique que pourrait offrir au pays le contrôle de la Mandchourie. Lorsque le Japon envahit cette région et constitue l’état fantoche du Mandchoukouo, l’obsession première d’Ishiwara reste de préparer la guerre contre les États-Unis, qu’il appelle depuis toujours de tous ses vœux. Pour ce faire, il prône un programme d’actions passant par l’établissement d’un état de défense nationale (en transférant la partie essentielle de la préparation de la guerre en Mandchourie et en augmentant de manière conséquente les forces de l’armée de l’air nipponne), l’élimination au sein de la formation des soldats de toute tendance libérale, et l’organisation du Mandchoukouo comme première ligne de défense militaire (p. 197-198). Mais Ishiwara n’est pas le seul à égrener des utopies fascistes et impérialistes. C’est justement cette course effrénée à la guerre qui perdra le Japon, son haut commandement militaire s’égarant entre l’antagonisme avec la Chine et ses velléités d’expansion en Asie du sud-est, deux conflits armés qui étaient de toute façon perdus d’avance.

 

 

Par Matthieu Roger

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28 janvier 2013 1 28 /01 /janvier /2013 21:24

In Machiavel – Œuvres complètes, Bibliothèque de La Pléiade, Éditions Gallimard, 1952

 

machiavel

 

 

 

La vie de Castruccio Castracani da Luccase se lit comme un roman. Elle raconte la passionnante destinée de Castruccio Castracani, condottiere qui fut seigneur de la ville de Lucques de 1316 à 1328. Non content de raconter la vie mouvementée de ce grand capitaine italien, Nicolas Machiavel mêle la fiction aux faits historiques pour en dresser un véritable panégyrique, le plaçant même à la hauteur de Philippe de Macédoine et de Scipion l’Africain. « Il vécut quarante-cinq ans, et fit voir une grandeur d’âme digne d’un souverain, dans toutes les périodes de sa vie. (…) Comparable en sa vie à Philippe de Macédoine, père d’Alexandre le Grand, et à Scipion, ce célèbre enfant de Rome, il mourut à l’âge de ces deux héros, et sans doute il les aurait surpassé tous deux si, au lieu de naître à Lucques, il eût eu pour patrie la macédoine ou Rome. » (p. 940). L’histoire de Castruccio Castrani nous ramène au cœur des complots et conflits armés qui mettaient alors aux prises les différentes principautés italiennes. Avec en toile de fond la vielle opposition entre Gibelins, Guelfes et leurs partisans respectifs pour le contrôle de la Toscane. Ce qui stupéfie chez Castruccio Castracani, c’est avant tout sa capacité, quel que soit le contexte, à adopter les meilleures dispositions militaires. C’est comme si, au vu des succès et des victoires qui s’accumulent dans son escarcelle, le condottiere lucquois ne faisait simplement qu’appliquer les maximes livrées par Sun Tse dans L’Art de la guerre. Ruses de guerre, division des ennemis, utilisation optimale de la topographie, répartition experte de ses troupes, ténacité dans l’adversité, tout y passe !

 

Mais l’auteur cherche ici à forger une légende, en écrivant une vie exemplaire à la manière de Plutarque et Pétrarque. Comme le rappelle Edmond Barrincou dans ses annotations, Machiavel n’hésite ainsi pas à inventer tel ou tel personnage, à modifier la filiation de son héros, ou encore à résumer deux batailles en une seule (en l’occurrence la bataille de Serevalle, qui « mixe » en fait celles d’Altopascio et Montecarlo). En seulement trente pages, l’historien des Histoires florentines ou du Discours sur la première décade de Tite-Live démontre qu'il fut aussi un remarquable conteur de hauts faits.

 

 

Par Matthieu Roger

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14 janvier 2013 1 14 /01 /janvier /2013 12:35

Bimensuel édité par Mondadori France

 

cover Guerres-Histoire-n°10

 

 

La couverture de ce dixième numéro de Guerres & Histoire – déjà ! – nous présente sans ambiguïté la teneur du dossier principal : « La guerre de Cent Ans - Les clefs d’une révolution militaire ». Vingt-quatre pages, pas une de plus, pas une de moins, pour décortiquer l’art de la guerre au Moyen-Âge et les tactiques employées par les différents partis engagés dans ce conflit, qui dura exactement cent seize ans. De nouvelles armes apparaissent, comme les premiers canons, l’utilisation massive de fantassins ou encore le longbow (l’arc long). Du fait des recompositions incessantes des alliances et des allégeances, la guerre de Cent Ans fut de celles qui requirent le plus d’aptitudes de la part des généraux en chef. Non seulement il leur fallait être capable de conduire leur armée lors des batailles rangées, mais  ils durent également démontrer leur science des raids en terres ennemies ou encore de la poliorcétique, les sièges de places fortes représentant alors la majorité des affrontements. Parmi les grandes figures militaires de cette époque, citons, entre autres, le « Prince Noir », Bertrand du Guesclin, Robert Knolles, Henri V, John Talbot, le duc de Bedford et le comte de Clermont. Jeanne d’Arc présente bien sûr un cas à part, abondamment traité par la littérature et le cinéma (cf. « Jeanne, héroïne aux voix multiples » p. 98-99). Le point fort de ce dossier est de montrer les répercussions importantes qu’eurent toutes les réformes des outils militaires sur les champs économique, politique et social. Comme le résume Jean Lopez dans son éditorial, l’effondrement de la chevalerie à Crécy ou Poitiers précipite la chute du système féodal, la montée de l’infanterie impose le peuple comme un nouvel acteur politique à part entière, et l’arrivée de l’artillerie renforce le pouvoir royal, son autorité et sa fiscalité.

 

Toutefois l’article à ne pas louper de ce nouveau Guerres & Histoire est sans conteste l’interview de Zvika Gringold réalisé par Eitan Haddok, qui revient sur son combat d’anthologie mené au Golan en octobre 1973. À la tête de seulement quelques chars, le lieutenant israélien Gringold réussit en effet à tenir à respect pendant un jour entier plusieurs centaines de blindés syriens. Ou comment une infériorité numérique accablante ne signifie pas toujours forcément la défaite… Un témoignage stupéfiant !

 

 

 

Par Matthieu ROGER

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3 décembre 2012 1 03 /12 /décembre /2012 23:39

Hors-série Histoire n°1 - Sciences Humaines Éditions, 2012

 

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Ce premier grand dossier hors-série du magazine Sciences Humaines nous propose un panorama intégral du phénomène guerrier depuis la nuit des temps. Afin de mener au mieux cette étude de la guerre à travers les âges, Jean-Vincent Holeindre et Laurent Testot ont scindé le corpus d’une trentaine d’articles en quatre grandes périodes chronologiques : « Aux sources de la guerre », abordant la période des guerres préhistoriques jusqu’à la défense de l’empire byzantin, « Les États combattants », du Moyen-Âge jusqu’à la Révolution et l’Empire, « Vers l’apocalypse », de la guerre de Sécession jusqu’à la Guerre froide, et enfin « Les temps des conflits asymétriques », qui traite de la guerre à l’ère contemporaine. Gages de qualité, on retrouve les contributions d'historiens et polémologues tels que Philippe Contamine, Guillaume Lasconjarias, Gérard Chaliand, ou encore Pierre Hassner. Les articles les plus intéressants sont ceux qui traitent des époques ou épisodes les plus méconnus. Citons par exemple le passionnant entretien avec Lawrence H. Keeley sur "Les guerres préhistoriques", où l'on apprend que les guerres primitives étaient souvents plus destructrices, plus fréquentes et plus violentes que les guerres modernes, ou bien encore l'aperçu de "La stratégie de l'Empire byzantin" proposé par Jean-Claude Cheynet, qui montre que les stratèges de Constantinople prônaient un savoir militaire fondé sur la guerres de mouvements et les embuscades. Des repères chronologiques et propositions bibliographiques viennent scander les quatre grands chapitres de ce hors-série, venant ainsi cadrer ces tentatives salutaires de vulgarisation historiques. Puisque la guerre accaompagne l'humanité depuis ses origines, il ne nous faut jamais oublier qu'elle constitue avant tout un fait social total, aux dimensions multiples, aussi bien militaires que politiques, économiques, culturelles ou juridiques. Sans se méprendre pour autant sur les enjeux décortiqués par vingt-cinq siècles de réflexion stratégique. C'est d'ailleurs uniquement à l'aune de cette démarche de compréhension pluridisciplinaire du choc armé que nous devons par exemple aujourd'hui appréhender les conflits se déroulant au Soudan, en Palestine ou en Syrie. A l'heure des drones, des cyberguerres et du technologisme, soulever la question de la fin de la guerre n'a jamais semblé aussi peu pertinent.

 

 

 

Par Matthieu ROGER

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18 novembre 2012 7 18 /11 /novembre /2012 15:57

Éditions Soteca, 2012

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Mon commandement en Orient est le récit, écrit par le Général Sarrail lui-même, de sa période passée en tant que général en chef des forces de l’Entente sur le front des Balkans, de 1915 à 1917. Plus qu’un descriptif très précis des mouvements tactiques des deux camps sur la ligne de front grecque, il s’agit là en fait des mémoires d’autojustification de Sarrail, dans la mesure où ce dernier cherche continuellement à louer ses prises de décisions personnelles, tout en accablant dans le même temps les acteurs qui gravitent autour de lui de reproches divers et variés. Cette tendance lourde à l’autojustification peut parfois énerver, mais elle a cependant le mérite de pointer du doigt les difficultés d’un commandement interarmes et interallié. Les forces placées en théorie sous le commandement du Général sont constituées de contingents non seulement français, mais également anglais, russes, italiens, serbes, auxquels viendront s’ajouter plus tard quelques troupes grecques. Considérés comme un front secondaire de la Première Guerre mondiale, les Balkans ne sont pas scrutés, la plupart du temps à juste titre, comme une priorité par le Grand Quartier Général (GQG) et les dirigeants politiques français. De manière quelque peu réductrice, on peut dire que la mission principale de Sarrail durant ces trois années se résuma à fixer l’armée bulgare afin de soulager les autres fronts de l’Entente. Même si le Général Sarrail fait souvent montre d’audace et de pugnacité pour tout ce qui toucha aux affaires militaires, les commentaires et annotations de Rémy Porte s’avèrent essentiels si l’on veut comprendre les luttes d’influences politiques qui se jouent alors en coulisses dans l’hexagone. Rémy Porte nous propose en effet un travail remarquable de décryptage et d’analyse historique des faits évoqués par Sarrail, replaçant dans leur contexte les responsabilités respectives des différents personnels politiques et militaires. Voilà qui explique la présence pour le moins étoffée et fournie des notes de bas de page.

 

Mon commandement en Orient est un livre à lire par tous ceux qui s’intéressent au premier conflit mondial. Il rappelle que la figure du Général Sarrail, pourtant méconnue aujourd’hui, comptait alors sur la scène nationale française. Ce sont d’ailleurs ses divers appuis ministériels qui lui permirent de décrocher son généralat en chef en Orient. Étude d’un cas concret d’action militaire, Mon commandement en Orient propose une lecture à la fois politique, stratégique et tactique d’un théâtre d’opérations précis. Instructif.

 

 


Par Matthieu Roger

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18 septembre 2012 2 18 /09 /septembre /2012 21:43

Bimensuel édité par Mondadori France

 

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L’article le plus intéressant de ce huitième numéro de Guerres & Histoire est sans nul doute celui que Roger Crowley consacre à l’Arsenal de Venise (p. 76-81). Fondé en bordure de la Lagune de Venise en 1104 par le doge Ordelafo, celui-ci subit en 1303, 1473, 1564 et 1810 quatre phases d’agrandissement qui en feront un gigantesque complexe industriel, peut-être « la première usine du monde » pour reprendre le titre de l’article. Sur un modèle qui n’a rien à envier à l’organisation du travail fordiste, les successeurs d’Ordelafo réussiront à établir une chaîne continue de production de galères, en s’appuyant la standardisation des matériaux, la spécialisation des tâches de travail, des chaînes d’assemblage efficientes et un stockage des ressources référencé avec précision. Ainsi l’arsenal devient pendant plusieurs siècles une véritable usine forteresse dédiée à la production de navires de guerre, et par extension le principal complexe national de construction et de logistique militaires de la Sérénissime. Au cœur du Moyen Âge ce sont 16.000 hommes qui y travaillent, dont 2000 ouvriers hautement qualifiés, les arsenalotti. Comme l’indique Roger Crowley, « grâce à son arsenal, Venise dispose en permanence, du XIVe au XVe siècle, d’une flotte de galères de 10 unités en temps de paix, de 25 à 30 en temps de guerre ». De quoi s’opposer aux velléités turques, qui se font de plus en plus pressantes à partir du XVe siècle. Si victoire de Lépante (1571) il y eut, c’est notamment parce que la République de Venise pu fournir une centaine de galère et quelques galéasses à la flotte hispano-italienne commandée par don Juan d’Autriche.

 

Par ailleurs, Yacha Maclasha revient lors d’une interview de Lennart Samuelson sur l’ouvrage récemment publié par celui-ci et intitulé Tankograd, The Formation of a Soviet Company Town : Cheliabinsk 1900s-1950s (Palgrave Macmillan, 2011). Le professeur au Stockholm Institute of Transition Economics y présente le fonctionnement de « Tankograd », vaste tripole soviétique regroupant Tcheliabinsk, Sverdlovk et Nijni Taguil, qui constitua  le plus grand site de production de chars non seulement de l’URSS mais aussi du monde. Plusieurs siècles après l’arsenal de Venise, « à elles seuls, les trois villes ont construit 18.000 chars lourds ou canons autopropulsés pendant la Seconde guerre mondiale sur un total de 97.700 ». Ou quand la concentration industrielle transcende l’effort de guerre…

 

 


 

Par Matthieu ROGER

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8 août 2012 3 08 /08 /août /2012 15:16

Bimensuel édité par Mondadori France

 

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Pour ce septième numéro de juin-juillet, Guerres & Histoire propose un grand dossier décortiquant le mythe de la supériorité militaire germanique. Trente pages au cours desquelles Jean Lopez, Thierry Widemann, Benoist Bihan et Nicolas Aubin relativisent le prestige recueilli par l’armée allemande au cours des derniers siècles. Les critiques les plus pertinentes portent sur l’obsession de l’état-major prussien puis allemand d’une recherche de la bataille décisive. Une obsession qui peut se comprendre, puisque de par sa situation géographique centrale sur le continent européen, qui induit une potentielle multiplicité des fronts, l’Allemagne sait qu’elle ne pourra mener efficacement que des guerres relativement courtes. Ce que montrent les différents articles de ce dossier, c’est que le commandement allemand a commis ses plus lourdes erreurs sur le plan stratégiques. Avant de constituer des échecs sanglants sur les champs de batailles, les deux guerres mondiales perdues par l’Allemagne furent avant tout des fiascos diplomatiques conduisant le pays dans une impasse stratégique inéluctable. Ce culte de l’offensive trouve ses sources dans l’hagiographie souvent courtisane du roi-soldat Frédéric II, dont les défaites ont étrangement été évacuées de la mémoire nationale (défaites cuisantes de Gross Jägersdorf et Kolin en 1757, de Kunersdorf en 1759). Et Nicolas Aubin de citer en préambule de son article « Quand les vaincus écrivent l’Histoire » cette citation que l’on doit au romancier américain Tom Clancy : « Pourquoi les gens font-ils une fixette sur des militaires allemands qui n’ont pas gagné une guerre depuis 1871 ? ». Si Nicolas Aubin montre bien que les vaincus et leurs sympathisants (par exemple Jean Mabire ou Marc Augier) ont su réécrire l’histoire pour la plus grande gloire des armes allemandes, regrettons qu’il réduise la figure de Basil Liddell Hart à un vulgaire manipulateur de l’histoire. Ce n’est pas là rendre justice à ce que ce grand théoricien militaire britannique a apporté à la pensée stratégique militaire.

 

À lire également, entre autres, les passionnants articles de Pascal Brioist et de Laurent Quisefit, qui abordent respectivement la bataille de Ravennes remportée par les Français sur les Espagnols en 1512, et l’invincibilité légendaire du cavalier mongol. Si à Ravennes la victoire est obtenue par la combinaison interarmes de l’artillerie, de l’infanterie et de la cavalerie, inédite pour l’époque, les conquêtes mongoles trouvent leur explication première dans l’alliance extraordinairement efficace de l’étrier haut, de l’arc composite et de la discipline militaire.

 

 

 

Par Matthieu ROGER

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30 mai 2012 3 30 /05 /mai /2012 17:27

Bimensuel édité par Mondadori France

 

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Pour son sixième numéro, le magazine Guerres & Histoire nous propose un dossier extrêmement complet sur l’histoire, le fonctionnement et le commandement de la légion romaine. Cet outil militaire formidable permit en effet aux troupes de la République puis de l’Empire d’étendre leur hégémonie durant plusieurs siècles autour du monde méditerranéen. Ce dossier permet d’appréhender l’atout tactique inestimable que constituèrent les légions face à leurs ennemis antiques. Même si certaines de leurs défaites sont passées à la postérité, telles Cannes (216 av. J.-C.), Carrhes (53 av. J-C.) ou encore Teutobourg (9 ap. J.-C.), la longévité de leur emploi détonne dans l’histoire militaire. La force des légions romaines  vient de leur extrême discipline, inédite à l’époque. Organisées en centuries (100 hommes), manipules (200 hommes) et cohortes (600 hommes), les légions, théoriquement fortes de 6000 soldats (légionnaires, auxiliaires et cavaliers) se distinguent également par leur capacités manœuvrières sur le champ de bataille. L’enquête de Guerres & Histoire s’emploie avec succès à démêler le vrai du faux au sujet de cette formation militaire révolutionnaire qui mit fin au règne de la phalange.

 

Je conseille également la lecture de l’article Les canons du sultan sonnent le glas de Constantinople, qui narre le siège de la capitale de l’empire byzantin par les troupes sultan Mehmet II. Cet épisode constitue en fait un épisode charnière de l’histoire militaire, puisqu’il scella en 1453 la supériorité de l’artillerie sur les fortifications. Mehmet II bénéficia pour ce siège de l’aide d’un ingénieur hongrois quoi inventa des canons dont la portée et le diamètre n’avaient aucune commune mesure avec ceux des bombardes jusqu’alors utilisées. À souligner également l’article d’Antoine Reverchon intitulé Guerre de 70 : la France n’était pas battue d’avance, qui montre qu’en 1870 les troupes françaises, avec un haut commandement à la hauteur, auraient pu fournir une opposition de toute envergure aux Prussiens.

 


 

 

Par Matthieu ROGER

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13 mars 2012 2 13 /03 /mars /2012 00:28

Éditions Larousse, 2011

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Je ne sais pas si, à, l’instar de ce qu’annonce le titre, Les Thermopyles peuvent être considérés comme la plus célèbre bataille de l’antiquité. Mais ce dont on peut être sûr, c’est que rarement dans une bataille la gloire des vaincus n’aura autant éclipsé celle des vainqueurs. Face aux armées gigantesques de l’empereur perse Xerxès venues mettre au pas la Grèce, fortes d’environ 300.000 hommes, 7.000 Grecs, dont les 300 soldats d’élites du roi spartiate Léonidas, vont tenir durant trois jours l’étroit défilé des Thermopyles (-480 av. J.-C.). Cet affrontement des plus sanglants et des plus inégaux, porté à l’écran de manière spectaculaire par Zack Snyder en 2006 dans son film 300, était en fait une mission suicide qui permit de retarder l’invasion de l’Attique et eut lieu au même moment que la bataille navale de l’Artémision (défaite perse).

 

Les Thermopyles – La plus célèbre bataillede l’Antiquité se lit comme un roman. S’appuyant essentiellement sur les travaux de Peter Green (Les guerres médiques, 2008) et de Michell Humphrey (Sparte, 2009), l’historien Luc Mary emploie un style très narratif qui fait mouche. La bataille des Thermopyles en elle-même ne représente que trois des onze chapitres de ce livre. Car loin de rester circonscrit au récit du brillant exploit tactique des Péloponnésiens, l’ouvrage narre l’ensemble des deux guerres médiques ainsi que la guerre du Péloponnèse. C’est donc une véritable synthèse des guerres du Ve siècle avant notre ère que nous propose ici l’auteur. Ce dernier, afin d’affiner son analyse de l’art de la guerre de Sparte, consacre toute sa première partie au mode de fonctionnement militaro-culturel de la capitale lacédémonienne. Appréhender Sparte en tant que « cité de la guerre » s’avère en effet être la seule manière valable pour comprendre à quel point la couardise au combat était chez le guerrier spartiate plus redouté que la mort elle-même. Se montrait-il peu courageux au combat qu’un Spartiate pouvait être déchu de sa citoyenneté, rejeté de la communauté et frappé par l’atimia, un décret spécial de disgrâce. Littéralement conditionnés à l’exercice de la guerre, réputés invincibles, les soldats à la cape rouge de Sparte, secondés avec bravoure par les Thespiens et les Thébains, montrèrent aux Thermopyles la quintessence de la discipline militaire. Un haut fait d’armes que Luc Méry replace de manière passionnante au cœur du jeu diplomatique des guerres hellènes.

 

 

Par Matthieu Roger

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Rhapsodie

Mon âme et mon royaume ont pour vaisseaux les astres

Les cieux étincelants d’inexplorées contrées

Ébloui par l’aurore et ses nobles pilastres

J’embrasse le fronton du Parthénon doré

 

 

Frôlant l’insigne faîte des chênes séculaires

Je dévide mes pas le long d’un blanc chemin

À mes côtés chevauche le prince solitaire

Dont la couronne étreint les rêves de demain

 

 

Au fil de l’encre noire, ce tourbillon des mers

Ma prose peint, acerbe, les pennons désolés

D’ombrageux paladins aux fronts fiers et amers

Contemplant l’acrotère d’austères mausolées

 

 

Quiconque boit au calice des prouesses épiques

Sent résonner en lui l’antique mélopée

Du chant gracieux des muses et des gestes mythiques

Qui érigent en héros l’acier des épopées

 

 

Par Matthieu Rogercasque-hoplite