Mensuel édité par la SA Le Monde Diplomatique
Une nouvelle fois Le Monde Diplomatique fait mouche, à l’heure où tout et son contraire sont entendus dans les médias dans le cadre de l’élection présidentielle. Dans L’audace ou l’enlisement, Serge Halimi revient sur les enjeux économiques de l’élection française. Comme il le dit avec justesse, « la subordination des cercles dirigeants français à une droite allemande de plus en plus arrogante, attachée à son credo d’une « démocratie conforme au marché », érode la souveraineté populaire. La levée de cette hypothèque est au cœur du scrutin en cours. » Annoncée par François Hollande, la renégociation des traités cadres européens apparaît dès lors comme une condition sine qua non. Sauf que la plupart des gouvernements européens ne l’entendront pas de cette oreille. La gauche saura-t-elle alors aller au combat ? La question est posée. Revenant également sur les élections présidentielles françaises, Éric Dupin pointe du doigt les Acrobaties doctrinales au Front national. N’hésitant pas à instrumentaliser dans son discours des auteurs peu à même de cautionner l’extrême-droite, Marine Le Pen a fait de la critique du libre-échange économique et de l’immigration ses deux chevaux de bataille. Ce qui ne l’empêche pas de viser toujours et encore de nouveaux électorats, à l’image des enseignants. Au-delà de du score élevé recueillie par la figure de proue frontiste ce 22 avril 2012, n’oublions pas que ses positionnements racoleurs signifient purement et simplement « aucun partage des richesses ». Hautement amoral et idéologiquement dangereux.
On trouve nombre d’autres articles tout aussi intéressants dans ce numéro d’avril. En ce qui concerne le volet géopolitique, Alain Gresh revient sur l’Onde de choc syrienne. Dans la lignée – directe ou indirecte – des printemps arabes, les troubles qui agitent actuellement la Jordanie, Le Bahreïn et de manière bien plus dramatique la Syrie sont symptomatiques d’un affaiblissement des États, phénomène à mettre en parallèle du rôle croissant des milices au sein des joutes nationales (Irak, Kurdistan, Afghanistan, Liban, Palestine). Quoi qu’il en soit, nul ne connaît pour l’instant de quelle manière se soldera la lutte engagée par le peuple syrien pour une vie plus libre et démocratique. Si une nouvelle intervention étrangère reste pour l’instant hautement improbable, car susceptible d’attiser les tensions régionales, se profilent alors les hypothèses inquiétantes d’affrontements interconfessionnels généralisés ou d’un écrasement encore plus sanglant des mouvements revendicatifs par l’armée. Une recrudescence de violence qui en ce moment touche également le Sahel, conséquence de la guerre en Lybie et de la guerre civile à l’œuvre au Mali. Un état de fait clairement exposé dans l’excellent article de Philipe Leymarie Comment le Sahel est devenue une poudrière. Bonne lecture diplomatique à tous.
Par Matthieu ROGER