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4 mars 2019 1 04 /03 /mars /2019 18:06

Éditions Gallimard, 1949

 

 

 

Grâce soit rendue à André Gide lorsqu'il publia en 1949 cette Anthologie de la poésie française. L'auteur des Nourritures terrestres (1897) et des Faux-monnayeurs (1925) relevait alors un ambitieux défi : rassembler en un seul volume les joyaux intemporels de la poésie française. Proposant une sélection issues de soixante-huit auteurs, André Gide s'en va glaner vers et rimes sur plus de sept siècles, de Ruteboeuf au XIIIe siècle jusqu'à Guillaume Apollinaire au début du XXe. Il assume dès sa préface le choix très personnel de ces centaines de poèmes connus ou méconnus, affirmant que "si le recueil que voici marque sa préférence pour ce que la poésie française offre exceptionnellement de plus musical, il ne se fera pas faute de présenter aussi les exemples les plus parfaits de maîtrise verbale et de suasion oratoire où les Français ont de tous temps excellé" (page 12). Au vu de la place qu'il leur accorde au sein de sa compilation, les quatre favoris de Gide sont clairement identifiables : Pierre de Ronsard, Victor Hugo, Charles Baudelaire et Paul Verlaine. On ne saurait lui donner tort, surtout pour Baudelaire et Hugo. On regretta seulement le peu de place faite aux femmes, si ce n'est Louise Labé et Marceline Desbordes-Valmore, ainsi que la place restreinte accordée à des génies tels que Leconte de Lisle et José-Maria de Heredia. Mais c'est là chicaner face à la richesse lyrique de cette anthologie. J'ai ainsi pu relire avec délectation les vers de Charles d'Orléans, de Gérard de Nerval, d'Alfred de Musset ou encore Théophile Gautier, et j'ai même pris un grand plaisir à découvrir certains poètes talentueux aujourd'hui tombés dans l'oubli, à l'instar de Théodore de Banville ou de Henri de Régnier. Ce dernier écrivit par exemple des "poèmes anciens et romanesques" qui ne manquent pas d'un certain panache, dont celui-ci :

 

Ils ont heurté les portes d'or

Du pommeau rude de leurs glaives

Et leurs lèvres étaient encor

Amères de l'embrun des grèves.

 

Ils entrèrent comme des rois

En la ville où la torche fume

Au trot sonnant des palefrois

Dont la crinière est une écume.

 

On les reçut en des palais

Et des jardins où les dallages

Sont des saphirs et des galets

Comme on en trouve sur les plages ;

 

On les abreuva de vin clair,

De louanges et de merveilles ;

Et l'écho grave de la mer

Bourdonnait seul à leurs oreilles.

 

 

Par Matthieu Roger

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commentaires

C
Très bel article, très intéressant et bien écrit. Je reviendrai me poser chez vous. A bientôt.
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Rhapsodie

Mon âme et mon royaume ont pour vaisseaux les astres

Les cieux étincelants d’inexplorées contrées

Ébloui par l’aurore et ses nobles pilastres

J’embrasse le fronton du Parthénon doré

 

 

Frôlant l’insigne faîte des chênes séculaires

Je dévide mes pas le long d’un blanc chemin

À mes côtés chevauche le prince solitaire

Dont la couronne étreint les rêves de demain

 

 

Au fil de l’encre noire, ce tourbillon des mers

Ma prose peint, acerbe, les pennons désolés

D’ombrageux paladins aux fronts fiers et amers

Contemplant l’acrotère d’austères mausolées

 

 

Quiconque boit au calice des prouesses épiques

Sent résonner en lui l’antique mélopée

Du chant gracieux des muses et des gestes mythiques

Qui érigent en héros l’acier des épopées

 

 

Par Matthieu Rogercasque-hoplite